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Dans cette dernière conversation qui a eu lieu le 29 juin 2021 dans le cadre d’Ipev Live, Inès Abdel Razek du Palestine Institute for Public Diplomacy, Alain Dieckhoff du Centre d’études internationales de Sciences Po Paris et la réalisatrice indépendante katya Chelli ont échangé avec le journaliste Hal Plotkin sur les dynamiques particulières de la mémoire en Palestine et en Israël, sur la manière dont ces mémoires ont façonné le passé, et ont exploré comment les approches informées par les sciences sociales pourraient engendre des opportunités permettant un avenir moins violent.

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Résumé

Selon Alain Dieckhoff, la question de la mémoire est très importante dans le conflit israélo-palestinien car la création d’Israël en 1948 n’est pas perçue de la même manière du côté palestinien et du côté israélien. En effet, pour les Palestiniens, la création d’Israël est décrite comme  » la Nakba  » ( » la catastrophe « ). « Il ne faut pas avoir l’illusion que tout le monde est d’accord sur la mémoire du conflit », a-t-il déclaré. D’autre part, Inès Abdel Razek a observé que les Palestiniens n’ont pas la permission de raconter leur histoire. Selon elle, il y a un certain aveuglement et un déni qui effacent l’histoire des Palestiniens. La cinéaste Katya Chelli a insisté sur l’importance de créer des organisations susceptibles de rassembler les deux parties. « Il est important de trouver des moyens de créer des voies de communication. Le mur est physique mais aussi psychologique », a-t-elle déclaré.

En ce qui concerne les projets qui pourraient contribuer à raconter les histoires avec plus de précision et donner aux Palestiniens l’occasion de raconter leur histoire, Inès Abdel Razek a insisté sur la nécessité d’écouter les Palestiniens et d’examiner les dynamiques de pouvoir actuelles. Mais elle a déclaré : « Nous ne sommes pas dans une période de réconciliation et de guérison. La violence est quotidienne. Il existe aujourd’hui un système d’apartheid et une domination systémique d’un peuple sur un autre. Il ne faut pas l’oublier ». 

Selon Alain Dieckhoff, les historiens doivent faire leur travail et travailler sur les archives israéliennes. Il a expliqué pourquoi la question de la mémoire est un tel obstacle aujourd’hui, en mentionnant les inégalités entre les Israéliens et les Palestiniens et le fait qu’il n’y a pas de règlement définitif entre les deux parties. « Vous pouvez aller au-delà de la mémoire antagoniste si vous parvenez à un accord, mais nous n’en sommes pas encore là », a-t-il fait valoir. Katya Chelli, réalisatrice du documentaire « Healing Hearts » qui montre des Palestiniens et des Israéliens travaillant ensemble, a ajouté que la réalisation de films est importante car elle montre ce qui se passe de l’autre côté. Il existe une possibilité de collaboration et une occasion de changer les points de vue des deux côtés grâce aux films. 

Selon Alain Dieckhoff, il y a une montée du nationalisme religieux des deux côtés qui alimente l’intolérance, les Juifs et les Arabes luttent et beaucoup de gens paient le prix de ces projets nationalistes. Pour Ines Abdel Razek, la religion a été instrumentalisée politiquement mais c’est un symptôme plutôt qu’une cause. Elle a insisté sur l’importance de ne pas décrire ce conflit comme un conflit religieux. « Le sionisme est en grande partie un mouvement colonial et c’est ce qui a créé le problème », a-t-elle conclu, tandis qu’Alain Dieckhoff a affirmé que « la réalité n’est pas noire ou blanche, elle est grise ».